S’affirmer face à un comportement qui me pose problème
Lorsque notre enfant a un comportement qui nous pose problème, nous avons bien souvent du mal à nous affirmer de manière appropriée. Et ça peut donner « Tu m’énerves quand tu fais ça ! », accompagné parfois de noms d’oiseaux plus ou moins exotiques… Et là, contrairement à ce que nous espérons, notre réaction engendre la plus grande indifférence apparente de l’autre ou provoque un conflit.
Comment faire autrement ? Comment indiquer à mon enfant que son comportement ne me convient pas sans être agressif ? Comment l’inciter à changer sans lui faire perdre la face ou lui faire éprouver du ressentiment à mon égard ?
Lorsque le comportement de notre enfant nous pose problème, nous sommes contrariés, énervés ou en colère parce qu’il fait quelque chose qui nous empêche de satisfaire nos besoins.
Par exemple, votre aîné qui s’était porté volontaire pour aller chercher son petit frère à l’école n’a pas rempli son engagement, vous êtes dérangé au milieu de votre réunion pour aller le chercher de manière précipitée.
Ou encore, votre fils laisse dans le salon ses chaussures pleines de terre et ses affaires de sport alors que vous avez des invités.
Dans de telles situations, nos besoins ne sont pas satisfaits. Nous voulons nous aider nous-mêmes. Cela signifie que nous devons nous affirmer, nous dévoiler, donner à notre enfant des informations qui l’aideront à comprendre en quoi son comportement nous pose un problème, afin qu’il modifie son attitude. Voici deux manières de le faire :
1. En évitant les messages blessants et les “messages-Tu”
2. En formulant ce que Thomas Gordon appelle des “messages-Je de confrontation”
1. Éviter les messages blessants et les « messages-Tu »
Tout d’abord voyons comment éviter les messages blessants et les « messages-Tu ».
Parfois, lorsque nous avons un problème et que nous sommes contrariés, nous accusons l’autre en utilisant des paroles blessantes ou jugeantes. Les cris et les mots blessants, qui sont d’usage fréquent dans notre culture, ont malheureusement des effets négatifs, ils créent une relation tendue, « électrique » et ne permettent pas de résoudre les problèmes.
Si je veux communiquer de façon positive et résoudre les problèmes de manière constructive, j’évite le plus possible les attitudes et les mots blessants.
Voici quelques attitudes à éviter :
– Les cris,
– Les insultes,
– Le ton ironique,
– L’absence d’attention (ex : Je ne regarde pas mon enfant ou je suis sur mon téléphone pendant qu’il me parle),
– Juger mon enfant et non son comportement (ex : Tu es égoïste ! au lieu de « tu pourrais ranger tes affaires de sport dans ton placard »),
– Minimiser ce que l’autre ressent (ex : « Mais non, ce n’est pas grave, vous allez vous réconcilier demain ! » – quand mon enfant est désemparé après s’être disputé avec son ami),
– Généraliser le comportement (ex : « Tu ne ranges jamais rien ! » – au lieu de « tu n’as pas rangé tes affaires de sport »),
– Comparer les enfants entre eux (ex : Ta sœur, elle, n’aurait jamais laissé le salon dans cet état !),
– Critiquer, faire des reproches (ex : C’est toujours pareil ! Il n’y a pas moyen de garder une maison propre et rangée avec toi !),
– Menacer (ex : Si ça continue, je vais te priver de foot ou t’envoyer en pension !).
On gagne aussi à éviter les messages-Tu car ils rejettent la faute sur l’autre personne et disent dans les grandes lignes « Tu as tort », « tu es injuste », « tu devrais être plus responsable », « c’est de ta faute », « voici ce que tu dois faire ».
Dans mon exemple, cela pourrait être : “Tu n’es pas le seul à utiliser le salon, tu abuses vraiment de toujours laisser cette pièce en bazar !” ou « tu comptes ranger et nettoyer un jour ? »
Les messages-Tu vont particulièrement contrarier l’autre personne sans pour autant nous aider à obtenir ce dont nous avons besoin ou envie.
En résumé, les Messages-Tu :
✓ sont le plus souvent pleins de critiques et de jugements,
✓ attaquent l’estime de soi de l’autre,
✓ rejettent la faute sur l’autre,
✓mettent presque toujours l’autre sur la défensive et peuvent générer des argumentations ou des disputes,
✓ nuisent à la relation,
✓ ne facilitent pas la résolution d’un problème.
Lorsque je suis confrontée à un comportement qui me pose problème, je peux déjà commencer par porter mon attention aux mots que j’emploie en évitant les mots et attitudes blessantes ainsi que les messages-Tu.
Je peux aussi formuler un message-Je de confrontation.
2. Le message-Je de confrontation
Lorsque nous avons un problème avec une personne, nous aurons plus de facilité à initier un changement de comportement si nous lui disons nos pensées et ressentis de façon claire, directe, et sans accusation. Il est important d’assumer nos pensées, besoins et ressentis, et d’apprendre à les exprimer à nos enfants lorsque leurs comportements entrent en interférence avec la satisfaction de nos besoins. Thomas Gordon a appelé cela un « Message-Je de confrontation ».
Cela peut être difficile, nous sommes tous réticents à dire aux autres que leur comportement nous pose un problème. Et personne n’aime entendre cela. Nous craignons qu’ils se sentent blessés, se mettent en colère ou ne comprennent pas. Pour certains, cette appréhension est si présente qu’ils évitent tout simplement la confrontation. Le problème n’est ni traité ni résolu. L’autre personne est laissée dans l’ignorance du problème et nous développons du ressentiment à son égard.
Au contraire, le message-Je fait savoir à mon enfant ce qui m’arrive et ce dont j’ai besoin. Il n’accuse ni ne rabaisse personne et ne dit pas à l’autre ce qu’il doit faire.
Dans le message-Je de confrontation, je vais décrire :
1. Le comportement qui me pose problème
2. Les conséquences concrètes que ce comportement provoque chez moi
3. Mon ressenti
COMPORTEMENT / EFFETS / SENTIMENT : ces trois parties peuvent se positionner dans n’importe quel ordre, bien que cet ordre soit souvent le plus efficace.
Premièrement, la description du comportement : c’est uniquement ce que je pourrais filmer ou enregistrer. Les sentiments intérieurs, interprétations, jugements, pensées, ou suppositions ne sont pas des comportements car nous ne pouvons pas les observer directement, factuellement. Je décris factuellement sans être accusateur.
Ex. si je dis « tu agis vraiment comme un égoïste » : c’est un jugement
Si je dis « Tu laisses au salon tes chaussures pleines de terre et tes affaires de sport. Il y a de la boue sur le tapis. » : je décris le comportement
Ensuite, nommer les conséquences concrètes que le comportement de l’autre a sur moi : cela lui permet de se rendre réellement compte de la manière dont son comportement limite ou empêche la satisfaction de mes besoins. Les personnes peuvent mieux nous comprendre et s’identifier à notre problème. Les conséquences concrètes sont les effets réels et directs que nous n’apprécions pas ou que nous ne voulons pas avoir à subir : nous prendre du temps, de l’énergie ou de l’argent, nous empêcher de faire quelque chose, nous demander davantage de travail, nous fatiguer, nous faire mal physiquement ou nous donner de l’inconfort.
Ex : perte de temps et d’énergie pour ranger et nettoyer le salon avant que les invités n’arrivent, nous mettre en retard pour commencer à préparer le repas avec le risque de ne pas avoir le temps de finir à temps.
Troisièmement, mon ressenti : c’est une sensation que nous éprouvons en réaction au comportement de l’autre personne et que nous éprouvons dans notre corps (et pas dans notre tête).
Ex. je suis agacée, je crains de ne pas pouvoir finir, je crains de ne pas récupérer le tapis sali.
Ainsi, dans mon exemple, le message-Je pourrait être :
Lorsque tu laisses au salon tes chaussures pleines de terre et tes affaires de sport alors que j’attends des invités, je suis agacée car je perds 15 à 20 minutes à ranger et nettoyer. Je suis en retard pour commencer la préparation du dîner, et je crains de ne pas finir à temps.
Le message-Je de confrontation est donc une manière de dire aux autres, sans les agresser, que leur comportement nous pose un problème.
Puisque le message-Je n’accuse pas l’autre, il est moins susceptible de se mettre sur la défensive, et nous avons plus de chance de le voir coopérer.
Par Edwige Grouin, Formatrice Gordon accréditée